mardi 31 janvier 2012

The Maple Hôtel. Avec l'érable, faites donc du rab



Vous savez ce qu'il y a de plus chouette qu'une journée à Dublin ? Une nuit à Dublin. Si vous vous baladez du côté de Wexford street ou de Georgia's street un vendredi soir, ne soyez pas surpris si vous entonnez malgré vous un air Clerc tel ce couplet : "Depuis que j'ai vu le jour, je préfère la nuit". Si Paris est une fête, Si Londres est une foire, Dublin est une bête sans somme, où chaque journée n'est qu'un long prélude à la nuit. Se laisser griser ici est plus facile que de tomber amoureux sur une plage de Copacabana, et l'extravagant amoncèlement de pubs que compte la ville y est pour beaucoup. Malgré la crise, malgré les fermetures récentes (1300 pubs ont fermé en Irlande ces cinq dernières années), il y en aurait encore un millier à courir le long des rues de la capitale. C'est beaucoup. Chaque soir, mais surtout du mercredi au dimanche, les bolées de houblon doublonnent, les trottoirs accueillent des cohortes urbaines et parfois, lors des grandes migrations, d'hardis hardes de hauts talons dérapent, en éclatant de rire. Problème, passée une certaine heure, incertaine souvent en raison des multiples horaires de fermeture des bars, la même question triviale ressurgit ici comme ailleurs : Where do we go maintenant ?
Evidemment, on peut toujours se traîner jusqu'en boîte. Elles ne manquent pas à Dublin et les horaires de fermeture sont également très élastiques. Mais on a trouvé mieux, beaucoup mieux. Laissez donc les gogos de la Gaga clubber de leur côté et rejoignez The Maple hôtel, le repère des nuits qui refusent de mettre les pouces et de s'enfouir sous les draps. Tomber sur l'érable (maple en anglais), c'est prolonger le plaisir. C'est rabelaisien par excellence. C'est surtout très pratique.
The Maple se situe au 75 Lower Gardiner street. En plein centre ville. L’accès eu bar est gratuit mais avant de rentrer dans la salle, situé au rez-de-chaussée, il faut d'abord remplir des papiers à la réception. Le rituel est un peu étrange la première fois, mais vous comprendrez vite : le bar est censé être réservé aux clients de l'hôtel, vous êtes donc censé être un client de l'hôtel, ce qui sera le cas une fois les papiers remplis. Elementaire. C'est factice, on imagine que la police ne doit pas être très dupe, mais c'est folklorique. L'entrée du bar est gardée par un vieux sage tout en grimace et en barbe longue. C'est un type rondement sympa, un vrai north sider, donc incompréhensible. Cela ne l'empêche pas de pousser la chansonnette de temps en temps (voir vidéo), et c’est aussi intelligible que du Mylène Farmer (quelqu’un a-t-il déjà compris ce qu’elle minaude dans le micro, franchement ?)



L'intérieur est austère, mais moins que le programme de Nicolas Sarkozy, faut pas déconner. Aux murs, quelques photos retracent l'histoire du pays et Michael Collins, toujours lui, semble veiller au bon déroulement des opérations. Le bar donne sur la chaise du portier qui donne sur le droit d'entrer. Si vous êtes arriver jusque là, et à moins que vous n'entamiez un God Save the Queen en ré mineur, c'est qu'on ne vous refusera pas l'accès. On est en Irlande quand même.
Au Maple, le week-end, les tables se remplissent de verres à moitié vides, à moitié à pleins et les chaises de clients à moitié ivres, à moitié pleins. Vous y croiserez de tout : des anglaises un peu délurées venues célébrées en grande pompe la fin d’un célibat, des jeunes de tous horizons à la verticale et des vieux dubliners assis, prêts à refaire l’histoire du pays toute la nuit. Enfin tant que les Guiness fraiches alimentent la flamme et le verbe.



Avec un peu de chance, vous tomberez sur un concert. Parfois, des musiciens qui se sont produits dans d’autres bars de Dublin viennent faire un dernier tour de chant et régler d’ultimes notes. Un fumoir est à disposition juste à côté de la salle et s’avère souvent le dernier bastion des irréductibles, ceux qui restent sourds aux injonctions fortes du frêle barman, un Indien luné selon la marée.
Vers 4h30, il faudra songer à partir. Vers 5 heures, il faudra vraiment sortir. Vers 5h15, tout le monde sera d’accord pour aller se coucher. Ou presque.

Aucun commentaire: